Affichage des articles dont le libellé est roman. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est roman. Afficher tous les articles

mardi 7 juillet 2020

"Il est encore temps" de Jean-Philippe Blondel

Chronique du blog Les lectures de Lily


Tout est dans le titre. Il est encore temps de changer nos mauvaises habitudes, temps de sauver la planète. C'est le message que délivre ce livre écrit par Jean-Philippe Blondel.

Lou est en train de terminer son année de troisième, c'est en écoutant un discours de Greta Thunberg qu'elle va prendre conscience de l'état de la planète et des changements qu'il est nécessaire de mettre en place afin de sauver celle-ci.

Écrit avec beaucoup d'intelligence, ce récit tire la sonnette d'alarme et met le doigt sur un sujet d'actualité important.
Les personnages ne sont pas particulièrement attachants, mais on s'en fiche, l'intérêt de ce livre se trouve dans son contenu, dans ses mots. C'est ce que je retiendrai et c'est pour cette raison que je le conseillerai.
J'ai aimé l'histoire, la façon dont elle est écrite. Jean-Philippe Blondel a une plume très appréciable, concise, il maîtrise son sujet et son message est clair. Son livre parle de politique, d'environnement, mais n'est pas moralisateur, il est extrêmement juste. J'espère qu'il sensibilisera un plus grand nombre de lecteurs et qu'il changera quelques mentalités.

“J’imaginais bien qu’un jour je trouverais un mentor ou un modèle, un ou une artiste, quelqu’un qui exprime ses émotions et les fait partager à un public. Jamais je n’aurais cru que mon existence puisse être bouleversée par une espèce de gamine rouquine qui ressemble à toutes les petites soeurs chiantes du monde et qui s’exprime bizarrement parce qu’elle est autiste tendance Asperger. 
Je la regarde et je suis fascinée. La vidéo se termine avec un nouveau hashtag ClimateStrike. La grève pour le climat. Tout ce que je parviens à prononcer, c’est « Waow ».”

À acheter, à emprunter, à partager, ce livre est à lire par tous. Il est encore temps de changer les choses, tous ensemble, de faire des efforts afin de sauver ce qui est à sauver. J'espère qu'il aura de l'impact et qu'il déclenchera quelques prises de conscience.




"Une photo de vacances" de Jo Witek

Chronique du blog Takalirsa


Un roman plein de sensibilité qui sent bon les vacances, un regard plein de tendresse sur le délicat passage de l'enfance à l'adolescence.

L'été de ses dix ans marque un tournant dans la vie d'Eugénie. "Ni grande, ni petite, celle du milieu", elle en a assez d'être "la plus docile", celle que l'on place "un coup du côté des grandes, un autre du côté de Juliette" la petite dernière. Eugénie veut s'imposer davantage face à Adèle, l'aînée de 14 ans qui joue la "princesse qui, depuis que je suis née, n'a toujours pas réalisé qu'elle n'était plus la seule, l'unique, le joyau de la famille" et Juliette qui, du haut de ses deux ans, requiert beaucoup d'attention. Eugénie aimerait, de temps en temps, avoir "mes parents seuls avec moi" et les traditionnelles vacances dans le sud, alors que ceux-ci sont plus disponibles, lui semble le moment idéal.

Car depuis quelque temps, la fillette se sent tiraillée entre l'enfance qui s'enfuit et l'adolescence qui affleure ("toutes ces émotions en moi qui me secouent et me bouleversent"). Sa sœur, avec ses préoccupations nouvelles (maquillage, vêtements, garçons), s'éloigne de leurs jeux habituels, même si elles retrouvent leur complicité d'autrefois le temps d'un après-midi plongeons dans la rivière. D'un autre côté, Eugénie aimerait se faire plus féminine parfois, avec une jolie robe, du vernis et un petit sac. Elle oscille ainsi entre l'enfant pleine de rêves (devenir Jane Goodall), bourrée d'imagination qui joue dans la cours avec ses figurines d'animaux, et le désir de découvrir d'autres choses de la vie.

En réalité, Eugénie a peur de grandir ("le temps heureux que je ne peux pas retenir") et souhaiterait "demeurer pour toujours la petite sauvageonne" de ses parents. Elle redoute l'entrée au collège, ce "pays qui m'est complètement étranger" et de manière générale, l'adolescence: "C'est moche, l'adolescence. Et je n'ai pas envie d'y aller".

S'il ne se passe pas grand chose pendant ces quinze jours à Saint-Chinian (une balade à vélo, un tour au marché, une soirée bal du 14 juillet...), on prend plaisir à l'évocation de ces incontournables vacances en famille et à suivre les interrogations de la jeune héroïne, attendrissante.

Auprès de sa "super famille" davantage à l'écoute de ses délibérations intérieures qu'elle ne le pensait, Eugénie prendra peu à peu confiance et dans la scène du retour, qui fait écho au grand départ au début du roman, on sent tout le parcours personnel qu'elle a accompli: désormais "je n'ai plus peur, je suis prête à me métamorphoser".


lundi 22 juin 2020

"Il est encore temps" de Jean-Philippe Blondel

Chronique du blog Les lectures d'Antigone


Alors que la continuité pédagogique se termine à la maison, j’ai presque un peu de nostalgie à vous parler de ce livre… En effet, en cours de français, nous avons étudié avec mon fils les discours de Martin Luther King et de Greta Thunberg, le point de départ de discussions entre nous sur l’exaltation de la jeunesse (amplifiées plus tard au moment de l’étude d’Antigone) et le point de départ de ce roman… Nous sommes en 2019. Lou termine sa troisième et passe ses épreuves de Brevet. L’écoute d’un discours de Greta Thunberg la plonge soudain dans un état de sidération intense qu’elle va traîner tout l’été suivant, à la grande inquiétude de ses parents qui consultent un médecin. Lou est persuadée que le monde court à sa perte, qu’il n’y a plus rien à faire et que même la notion de Carpe diem n’est qu’un leurre pour ne pas regarder la vérité en face. Son médecin, complice et compréhensif, lui suggère de gérer son angoisse en se rendant utile. Ils raconteront à ses parents qu’elle souffre d’anémie, pour les rassurer. L’entrée au lycée de Lou va être l’occasion de nouvelles amitiés mais aussi de nouvelles expériences. Et si elle avait réellement le pouvoir d’éveiller les consciences ? 

J’ai choisi ce roman ado lors d’une opération masse critique de Babélio, pour son thème, le nom de son auteur, et celui de la maison d’édition qui l’édite. Et je n’ai pas été déçue. Dès le début, j’ai aimé sa qualité d’écriture, aimé plonger dans ce combat qui m’est familier et important. Son seul défaut est peut-être d’être bien trop court. 

A offrir à nos petits troisièmes, qui auront connu une année bien étrange ! Le confinement aura été pour moi l’occasion de passer des moments très intéressants avec mon fils, et de me réconcilier avec ma propre année de troisième, qui n’a pas été la meilleure de ma vie. Me rendre compte que je pouvais comprendre les cours et les lui transmettre, et que j’aimais ça, a été d’un grand réconfort et une surprise. Dans ce roman, la relation de Lou avec ses parents, surtout sa mère, est très jolie et émouvante. Ce livre distille un bel espoir et nous confirme que nous pouvons sans cesse nous réinventer et faire bouger le monde.

"Il est encore temps" de Jean-Philippe Blondel

Chronique du blog A touch of blue... Marine


Qui n’a pas entendu parler de Greta Thunberg ?

Dans cet essai déguisé en récit, Jean-Philippe Blondel met en scène une jeune fille qui ne peut rester les bras croisés devant le désastre climatique et politique vers lequel nous courrons tous. Un véritable wake-up call, une sonnette d’alarme que nous avons d’ailleurs pu voir en action dans différentes villes et pays à travers le monde lors des diverses manifestations.

Ce livre devrait sincèrement être distribué dans les classes de secondaires. Les jeunes (et les moins jeunes) ainsi que les professeurs et les parents, les politiciens et les chefs d’état… tout le monde devrait se sentir concerné par l’avenir… du moins ce qu’il en restera d’ici quelques années.

Il est encore temps de changer la voie vers laquelle notre bateau se dirige. Pour l’instant, on est plus axé Titanic mais cela peut encore changer. Avec des efforts, de la motivation commune, en faisant des choix difficiles, en se réveillant les uns les autres à agir.

Ce livre essaye de transmettre ce message fort et actuel. Il est encore temps. Mais il ne faut pas trop trainer. Et la moindre petite braise peut faire des étincelles. Une jeune fille qui se sent mal dans son époque car elle imagine le pire de son avenir. Une classe qui se sert les coudes pour agir et manifester. Des écoles qui refusent d’aller en cours pour marcher dans les rues afin de faire entendre leur voix…

Je remercie les éditions Actes sud pour l’envoi de cette nouveauté et je vous encourage tous de le découvrir. De le prêter aussi. De l’offrir à vos jeunes connaissances. Ceux qui se sentiront sûrement les plus concernés par le message et les personnages qui vibrent dans ces 140 pages.

C’est un récit qui suit l’actualité brulante qu’est l’écologie, le climat et notre avenir à tous. Ce n’est pas hargneux. Ce n’est pas politique. C’est simplement le début. Parce que cela ne fait que commencer.


"Les derniers des branleurs" de Vincent Mondiot

Chronique du blog Bookenstock


Banlieue parisienne, une manif qui finit en castagne avec les forces de l'ordre, trois ados derrière les vitres d'un MacDo. Minh Tuan et Gaspard regardent distraitement, Chloé filme avec son portable et balance la vidéo dans la foulée sur Instagram. Les hashtags fusent. Ils ne savent même pas l'objet de la manif... Scène de vie ordinaire, quotidienne.

Ils ont le Bac dans quatre mois, mais ils en ont strictement rien à secouer. S'ils vont en cours c'est pour passer le temps, pour finir leur nuit parfois, pour se retrouver aussi, avant de sécher les cours, puis aller zoner, fumer des clopes, du shit ou boire des concoctions de leur fabrication où se mélangent boisson sucrée, alcool et ampoule de Phénergan. Ils planent, ils sont bien ensemble. L'avenir pour eux se résume à aujourd'hui, voire demain, mais pas plus loin. Et ils le conçoivent à l'identique de la veille. 

Ils l'aiment bien finalement ce bahut, parce que le weekend qu'est-ce qu'ils s'emmerdent s'il n'y a pas une fête d'organisée où ils pourront aller foutre la merde (je précise que mes jurons sont bien légers à côté de ceux de Vincent Mondiot qu'on peut lire dans ces pages. La façon de s'exprimer de trio, particulièrement Chloé, est bien fleurie et n'en parait que plus authentique) ... s'amuser quoi ! À leur façon, car inévitablement ils finiront bourrés, ou déchirés, voire les deux en même temps. Parfait pour un dimanche comateux qui passera sans qu'ils s'en aperçoivent.

Arrive alors dans leur classe une réfugiée congolaise, Tina. Discrète, réservée et surtout bûcheuse. Et contre toute attente, l'alchimie va prendre et Tina sera intégrée petit à petit dans le trio. Elle va les tirer vers le haut, tandis qu'ils vont tenter d'enrichir son vocabulaire en insultes, leur seule façon de s'exprimer. À la clé, le Bac... L'auront-ils ces derniers branleurs ? Et bien je vous laisse le découvrir en vous procurant cette belle brique qui se lit avec beaucoup de plaisir.

Ces écorchés vifs deviennent de plus en plus attachants. Vincent Mondiot réussit très bien à nous les faire aimer, à les comprendre, avec son écriture et un vocabulaire réellement adapté (euphémisme... il m'en aurait presque appris, wesh ! =D). Leur je-m'en-foutisme cache bien des failles, et surtout des peurs abyssales en l'avenir. Je ne suis pas prête d'oublier ces ados qui m'ont procuré tant d'émotions intenses.

Mais ce que j'ai le plus aimé dans ce roman, ce sont toutes les annotations dans la marge qui agrémentent le texte. Faites sur un ton neutre, limite encyclopédique, qui tranche tellement avec le texte. Et à chaque fois on y décèle un humour délicieux. 

Franchement j'ai adoré, et je ne dis pas ça parce l'auteur y glorifie dans une de ses annotations le morbier, fromage de ma région hein !!! Je ne peux que vous encourager à le lire, ce roman est un véritable bijou à mettre dans toutes mains à partir de 15 ans !

"Les derniers des branleurs" de Vincent Mondiot

Chronique du blog Livres à profusion


Ce sont trois jeunes adolescents, en classe de terminale, qui passent le bac à la fin de l’année. Deux garçons et une fille, Minh Tuan, Gaspard et Chloé. Les deux derniers se connaissent depuis l’enfance. Minh Tuan les connait depuis trois ans. Son père travaille à l’ambassade. Il vient donc d’un foyer beaucoup plus riche que les deux autres. Gaspard a vécu la mort de sa grande soeur. Les parents de Chloé sont divorcés. Amitié ou pas, entre les trois ? Ce qui peut choquer le lecteur ? Les nombreuses grossièretés proférées par les uns et les autres. Ils dialoguent entre eux comme ça et aussi avec leurs camarades de classe. Les trois jeunes gens sont isolés. Ils n’ont pas d’amis et pensent ne pas avoir bonne réputation. Ils boivent, ils fument, ils se droguent et ce très tôt le matin.

Question scolarité, leurs résultats sont au plus bas. Ils sèchent les cours très souvent. Le bac approche, arrive très vite. Mais comme c’est la réforme, ils sont pratiquement certains de décrocher le précieux sésame. Pour eux ? Pas du tout. Car pour eux, leur avenir s’annonce plus que sombre avec la crise climatique et les mouvements de la jeunesse qui démontrent qu’ils n’ont pas beaucoup de temps à vivre. Profitent-ils de cette jeunesse ? On les sent désabusés. Mais sous ces dehors caricaturaux, poussés à l’extrême, sans que cela soit gênant pour le lecteur, que cachent-ils réellement ? Il semblerait que cela soit une profonde solitude. Ils sont trois et bientôt quatre avec l’arrivée de Tina, réfugiée congolaise. Sont-ils simples potes ou amis ? Peuvent-ils compterles uns sur les autres ? Sous ces bravades, ils ne se confient pas forcément. Pourquoi Chloé est-elle toujours énervée, virulente ? Ils ont peur de ne pas être aimés, de ne pas aimer. Certains dialogues peuvent paraître surréalistes mais démontrent le mal-être que peuvent ressentir certains jeunes, selon leur passé, leurs expériences.

Il a suffi de quelques mots de leur professeur principal, à quelques semaines de l’échéance du bac, pour qu’il y ait, en gros, un électrochoc. Ils sont vus comme les derniers des branleurs. Cela ne semble pas leur plaire, au premier abord. Mais au fond, ils veulent laisser une trace. Une trace de leur passage au lycée. Minh Tuan décide qu’ils auront leur bac et avec mention, rien que ça. Le plan qu’il met en place n’a pas la faveur des trois autres. Mais ce sera réalisé. Cela ne va pas les empêcher de réviser et de combler pas mal de lacunes. Beau comportement de Chloé à ce sujet.

L’auteur fait quelques apartés en expliquant certains mots, juste à côté du texte, ce qui permet de ne pas aller à la fin du chapitre, l’avenir de certaines personnes qui croisent le quatuor et même il donne quelques indices sur Chloé, Gaspard, Minh Tuan et Tina. Il explique l’arrivée des réfugiés étudiants, leur avenir en France. Il détaille les lectures de chacun, notamment les mangas. La musique tient une place réellement importante dans ce roman, tout comme le 7ème art, mais aussi le sexe. Il explique également ce que les professeurs, impliqués, peuvent ressentir pour exercer leur métier. Métier pour lequel ils ont la foi mais qui se révèle plus compliqué qu’il n’y parait. Car pas d’aide de la part de l’administration. Ils doivent également faire avec de nombreuses personnalités.

Vincent Mondiot nous offre de sacrés personnages. Le lecteur les aime, peut se reconnaître, prendre fait et cause pour eux, malgré leurs paroles et aussi leurs actes. Est-ce une forme de rébellion contre un système ? Est-ce une forme de rébellion contre les adultes et même contre leurs condisciples ? Que vont leur apprendre ces quelques mois ? Vont-ils grandir, trouver leur voie ?

mercredi 3 juin 2020

"PLS" de Joanne Richoux

Chronique du blog Les lectures de Lily


PLS de Joanne Richoux est un roman court (seulement 96 pages) mais fort et intense, il ne laisse pas indifférent, grâce à sa fin surprenante !

Vous découvrirez dans ce livre Sacha, un garçon écorché, et sa sœur jumelle, tous deux ont une forte complicité, ils se comprennent par le regard ou par les gestes, pas besoin de grands discours... Leur relation est assez mystérieuse tout comme l'ensemble de ce livre d'ailleurs.
Lors d'une soirée d'Halloween bien arrosée, Sacha partage un petit peu de temps avec une jeune fille pour qui il a des sentiments amoureux. Tous les deux se découvrent intimement, leurs secrets explosent et nous sont dévoilés.

Chacun de tes gestes est précis, mais désinvolte en même temps. Tout me plaît chez toi. Ton ventre, ton prénom, l’odeur de tes cheveux. Ou de ton parfum, je sais pas exactement. Les deux. Et j’apprécierais vraiment qu’un détail nul te rende moins douloureuse.

J'ai découvert avec ce titre, la plume brute, moderne, crue, franche de Joanne Richoux.  Son roman destiné aux jeunes lecteurs dès 15 ans est explosif. Il est court, mais tellement prenant et marquant. Pas besoin de chapitres supplémentaires, il contient juste ce qu'il faut pour contenter le lecteur. Il nous embarque dans une histoire rude, difficile à cerner, mais qui prend forme au fur et à mesure que les pages se tournent. 

Je me doutais un petit peu de la fin, mais quand elle est arrivée, je vous avoue avoir eu la gorge serrée. Joanne Richoux a su me toucher avec son roman pour ados, je n'oublierai pas de sitôt Sacha et sa sœur !


"Joan Baez : Non à l'injustice" de Mureille Szac

Chronique du blog Takalirsa


Dans un récit où se mêle à la voix de Joan Baez celle d'une groupie qui l'a suivie toute sa vie, on découvre les convictions de cette chanteuse engagée autour d'un "rêve d'égalité, de paix et de justice".

L'injustice sociale, la jeune Joan sait ce que cela fait: ayant hérité du teint mat et des cheveux noirs de son père mexicain, elle est méprisée par les enfants blancs mais aussi, parce qu'elle ne parle pas espagnol, exclue par les petits Mexicains. Toute jeune aussi, elle découvre à Bagdad (où elle a habité avec sa famille) la misère et la souffrance des plus démunis. Mais c'est sa rencontre avec Martin Luther King qui déclenche sa vocation: ce grand homme qu'elle admire profondément "met des mots sur ce qui l'habite". A ses côtés elle fera la Marche pour l'égalité à Washington où elle chantera l'hymne de la protestation contre les lois racistes et ségrégationnistes, "We shall overcome" ("Nous vaincrons").

Comme lui, Joan "déteste la violence" et ses actions se feront toujours pacifiques. Car l'artiste ne se contente pas d'associer chanson et militantisme "juste avec ma voix et ma guitare": elle est également active sur le terrain partout dans le monde. Si cette courte biographie s'ouvre sur le festival de Woodstock, "le plus grand rassemblement hippie de tous les temps" contre la guerre au Viêtnam, on la croise également à Hanoï en 1972 sous les bombardements américains, ou encore en Thaïlande en 1979 dans les camps des réfugiés cambodgiens.

L'auteure nous transporte d'une époque à l'autre, ce qui peut déstabiliser un jeune lecteur n'ayant pas les connaissances historiques requises, cependant la chronologie en fin d'ouvrage permet de se repérer dans tous ces événements. On comprend vite que Joan Baez utilise, en plus de ses chansons, les caméras pour témoigner et dénoncer les injustices à travers le monde, quitte à faire de la prison pour défendre ses idées! Car plus qu'un combat, son idéologie humaniste est une façon d'être, au-delà des modes musicales et des audiences. D'ailleurs la chanteuse refusera toute sa carrière "de se vendre aux multinationales".

A travers les paroles de Nicole la fan de la première heure, on comprend toute l'influence de cette personnalité lumineuse et altruiste sur son public. L'ouvrage se termine avec un dossier sur les chansons engagées à travers le monde et les époques, mettant en lumière d'autres chanteurs "témoins engagés et critiques de la société".


"A tire d'elle - 1973" de Pascal Ruter

Chronique du blog Les Miss chocolatines bouquinent


"On dit qu’à seize ou dix-sept ans, c’est le moment où les choses commencent mais en fait c’est totalement faux. C’est simplement la période où plein de choses se terminent."

Pascal Ruter avec cette honnêteté intransigeante, parle d’un temps révolu qui résonne comme une chanson éternelle celle qui fut écoutée ou qui le sera bientôt.
Il n’y pas d’année qui tienne. Ce ressenti existentiel, cette période charnière où les rêves s’évaporent et les réalités se concrétisent, est la même pour tout en chacun avec des réflexions propres en son temps. Seul le contexte, les lieux, la société évoluent en mieux ou pas.

Solweig fait partie de cette génération où les mots cachent la triste réalité et où les secrets, la vie ne doivent pas être révéler. Solweig fait partie de cette génération où la famille n’a presque plus de sens et n’a pas encore eu le temps d’évoluer. Le vélo, la mob, les centres commerciaux qui sortent de terre où la surconsommation s’installe dans le foyers, et où le paraître semble tellement plus cool. Solweig ne trouve aucune beauté dans la ville où elle vit. Elle marche tête baissée pour fuir tout ce qui l’entoure. Sa meilleure amie qui dérape, son oncle qui ne reviendra plus, sa mère et son silence, sa future belle-mère qui n’est pas ce qu’elle dit être et un père qui tente à tout prix de retrouver sa jeunesse perdue. Solweig déteste cet individualisme, cette solitude forcée.

"J’ai pensé à maman qui n’allait sûrement pas tarder à rentrer, à papa qui préparait son mariage, à tous ces gens qui s’étaient aimés très fort et qui brusquement n’avaient plus rien eu à se dire, à tous ces gens qui allaient vieillir sans se faire un petit signe, et mourir comme ça loin les uns des autres. Comme des cons."

Solweig s’interroge, doute, rêve de rien, juste du moment présent. Cet étrange professeur d’histoire et à son amoureux. Valentin, artiste torturé, garçon en peine qui souffre de ne pas savoir, de voir son seul parent se détruire et le laisser seul affronter la vie.

Rentrée précipitée dans un monde qu’ils ne connaissent pas et qu’ils n’arrivent pas à apprivoiser. Courir pour ne plus être un enfant et marcher à reculons pour ne pas devenir un adulte.

"Il faisait beau, le printemps était un peu en avance, notre jeunesse commençait à peine et parfois j’avais l’impression que le temps n’existait pas."

Pascal Ruter dépeint avec précision ces tourments universels, cette métamorphose, cette mue, révélant le beau comme le sombre avec une étrange subtilité. Il y a ce quelque chose de tragique, de fort et de percutant, voleur d’instantanés où chacun peut en puiser ses souvenirs. On se rend très vite compte que l’espace temps n’est qu’une illusion. L’auteur nous offre une fresque inspirante sur le doux balancement d’une balade qui tend à la cavalcade, se terminant sur une mélodie sereine.

"Je les ai vus disparaître dans l’étroit escalier en colimaçon et je me suis dit qu’il ne faut jamais laisser passer une occasion de retrouver le passé avant de vieillir tout à fait."


"PLS" de Joanne RIchoux

Chronique du Blog Livres à profusion


C’est une partie de l’histoire de jumeaux, Sacha et Angelique-Angie. Ils ont organisé une fête chez eux. C’est Halloween. Pour Sacha, ce sera la première fois qu’il revoit tous ceux qu’il a côtoyés il y a déjà quelques temps.

Entre Sacha et sa soeur, c’est une relation très forte. L’un et l’autre se surveillent. Elle pour que son frère ne passe pas à l’acte. Lui, pour protéger sa soeur. Sacha est un jeune homme seul, aux idées noires. Pourtant, il veut échanger, mais tous ces gens lui font peur, il ne sait pas comment se comporter. Donc, il est tout de même agressif. Vivre avec les médicaments, être dans un autre état, lorsqu’ils sont pris, voir le monde pas tel qu’il est mais cela permet, plus ou moins, de l’affronter. Sacha, lors de cette fête, se rend tout de même compte que d’autres jeunes, comme lui, peuvent souffrir mais qu’ils le cachent.

Ecrire sur la souffrance psychologique, psychiatrique des jeunes afin que ces jeunes lecteurs puissent comprendre qu’ils ne sont pas seuls à souffrir, qu’ils doivent se faire soigner, en parler. Cela permet également aux parents qui peuvent lire ce genre de livres que leur enfant peut être malade. Car oui, on parle et on écrit sur les maladies psychiatriques, psychologiques. Quand je prends le bus, j’entends certains jeunes parler de leurs problèmes. Personnellement, je le vis au quotidien depuis huit ans. Avec toujours la peur au ventre de la TS. Mais certains n’ont pas de comportements à risques, ils ne mélangent pas alcool et médicaments. Et même s’ils sont suivis, le passage à l’acte peut très vite arrivé et également surprendre.

Les pages de ce livre se tournent très facilement et à un moment donné, c’est le choc,véritablement le choc. Dès les premières pages, dès que j’ai compris un peu ce qui se passait, je m’interrogeais sur le comportement d’Angélique qui semblait, à tous points de vue, une jeune fille comme les autres, même si elle surveillait son frère, même si elle était à ses côtés tout le temps.

Comment affronter la maladie d’un proche ? Comment affronter la maladie d’un jumeau alors qu’on les dit connectés entre eux ? Comment affronter l’indicible que l’on n’a pas su voir à temps ? Comment faire en sorte qu’une relation fonctionne des deux côtés. L’autre, même s’il a peur, même s’il doit affronter ses propres démons, même s’il a peur de s’écrouler, doit pouvoir accepter cet autre qui se révèle tout de même proche par bien des côtés. Alors oui, une relation n’est jamais gagnée d’avance. On peut être entraîné, on peut entraîner l’autre dans sa maladie. Mais des fois, quelque chose de beau peut sortir car il faut savoir et pouvoir échanger, se confier et tenter. Cela peut donner quelque chose de beau et permet de finir sur une note d’espoir.

Des mots crus, certes, des jeunes qui boivent beaucoup, sans mesure, qui ont des relations sexuelles sans lendemain. Mais des jeunes qui veulent vivre une belle histoire d’amour avec une personne qu’ils connaissent depuis plus ou moins longtemps. Des jeunes qui voient tout, qui s’excusent de faire subir, qui comprennent tout de même les adultes. Mais que c’est dur d’exprimer ses opinions, ses émotions, surtout après un drame, où tout le monde se renferme sur soi.

Comment affronter la maladie ? Comment affronter la mort ? Comment affronter la souffrance quotidienne ? Comment affronter cette solitude ? Le roman ne donne pas de conseils mais partage une expérience qui peut arriver à tout un chacun.

Ravie également de retrouver une référence, plusieurs fois, à une fragrance Mugler, Womanity avec sa note sucrée-salée, figue et caviar, une figue très présente pour Sacha et également les odeurs, lorsqu’il échange avec Elle. Une odeur représente une personne, une ambiance…


"Esperluette" d'Anne Vantal

Chronique du blog D'une berge à l'autre


« Tu es mon frère, mon ami, mon double, la moitié de moi. Tu es à jamais inscrit à mes côtés et relié à moi par une esperluette.»

C’est ainsi qu’elle conclut sa lettre. Une lettre qu’elle a mis des années à rédiger. Pour boucler la boucle, pour dire à Jordan ce qu’elle avait jusqu’alors enfoui profondément en elle. Revenir sur leur histoire commune remontant à la petite enfance. L’école, le collège, leur amitié inébranlable. Elle, l’élève brillante, lui, le cancre qu’elle n’a cessé d’aider pour qu’ils avancent dans leur scolarité au même rythme, jusqu’au lycée. C’est là que leurs chemins ont commencé à diverger. A 16 ans Jordan a arrêté les cours pour enchaîner les bêtises. D’abord petites, et puis de plus en plus « condamnables ». Quelques mauvaises rencontres plus tard, il a proposé un coup sans risque à sa meilleure amie. Elle a accepté du bout des lèvres, sans savoir qu’elle allait assister à un événement dont le souvenir la marquerait au fer rouge.

D’une seule traite elle couche sur le papier le passé et le présent. Pour tirer un trait, pour aller de l’avant. Les mots coulent avec fluidité, l’histoire est simple, tragique, tragiquement simple. Elle se lit comme le bilan d’une relation fusionnelle brutalement interrompue, une mise au clair limpide. Le retour sur les faits offre au lecteur un soupçon de suspens qui pousse à en savoir plus. D’emblée on comprend que cette lettre est une lettre à l’absent mais on voudrait comprendre le pourquoi de cette absence.

Pour la narratrice la lettre se veut cathartique, elle n’effacera jamais les souvenirs, bons ou mauvais, mais elle offre une libération intérieure, elle permet de repartir sur de nouvelles bases « pour commencer à vivre ». Une confession intime sans faux semblant, touchante et pudique.



lundi 17 février 2020

"Météore" d'Antoine Dole

Chronique du blog La bibliothèque de Noukette


Antoine Dole a écrit un hymne aux femmes. À toutes les femmes. À celles qui crient au dedans, à celles qui se taisent. À celles dont les entrailles brûlent des coups qui marquent au plus profond. À celles qui appellent les caresses et ne reçoivent que mépris. À celles qui pourraient être, qui auraient dû être et qui saignent d’être ce qu’elles ne sont pas. À ces chenilles pas encore papillons qui mesurent tout le chemin à parcourir pour s’envoler enfin. À celles qui se recroquevillent et enterrent ce qu’elles auraient pu être dans un monde moins… ou plus… À celles qui s’ouvrent malgré tout, ouvrent la voie, s’ancrent et tracent le sillon. Et à celles qui le suivent en espérant que les sacrifices ne seront pas vains…

Fragile et tellement forte. La voix de Sara nous fait retenir notre souffle. Elle résonne longtemps. Elle fait écho. Elle contient tout… Elle contient toutes les femmes… Antoine Dole ne le sait peut-être pas mais il a écrit son plus beau texte à ce jour. Et il m’a touchée comme jamais ♥


"Météore" d'Antoine Dole

Chronique du blog Méli-Mélo de livres


Quel uppercut que ce roman d'Antoine Dole !

J'ai du m'y prendre à deux fois pour le lire tant je manquais d'air dans cette lame de fond de mots qui met le lecteur dans la peau de cette jeune fille, dont justement l'enveloppe corporelle ne correspond pas à ce qu'elle est au fond d'elle depuis toute petite. 

Il ne nous épargne rien : la construction, parfaite, pose les enjeux de façon subtile. Il y a d'abord cette robe légère qui est osée être portée un jour d'été dans la rue. Cela parait anodin une robe. Pas toujours. 

Puis , c'est une plongée dans les affres douloureuses, une souffrance sans nom, de l'identité sexuelle et surtout le regard des autres. Car c'est toujours une question de regard. Le passage sur les insultes et leurs conséquences est particulièrement éprouvant. 

Mais il va plus loin encore et remonte ce long processus de descente au plus profond de soi quand on sait qui on est et qu'on ne peut être entendu. Il n'y a rien de pire que d'être enfermé dans son propre corps. C'est à 16 ans que Sara, enfin reconnue, peut effectuer sa transition et devenir cette météore que plus rien n'arrêtera. 

Est-ce qu'il ne faudrait que chacun puisse se créer ? Etre sa propre invention, son regard sur le monde, son cadeau à cet univers. 

Un roman d'une force inouïe, d'une sensibilité rare, qui sait regarder pour changer notre regard. Et qui va plus loin que le transgenre : c'est un roman féministe, qui dénonce ce que les femmes peuvent endurer au quotidien. Sur ce que signifie être femme.


"PLS" de Joanne Richoux

Chronique du blog Hashtag Céline


Je n'ai rien vu venir. J'ai commencé PLS avec une certaine fougue et je me suis pris un bon aller-retour (oui, double claque) encore une fois.

Après ma lecture de Désaccordée (mais pas que), j'avais un peu oublié à quel point Joanne Richoux était douée pour nous faire le portrait d'une adolescence tourmentée et nous entraîner dans des histoires réalistes surprenantes.

Avec Sacha, vous allez vivre, heure par heure, le déroulement d'une "fête". Enfin cette fête en est plus une pour les autres que pour lui qui n'a pas le cœur ni la tête à s'amuser. Il reste en retrait, comme spectateur de la vie des autres.

Le temps défile et il va s'en passer des choses pendant cette soirée où l'alcool se consomme avec excès, le sexe s'invite dans certains recoins plus ou moins sombres et où la musique recouvre le tout de battements et rythmes étourdissants. Mais, au coeur de cette ambiance sensuelle et no limit, transpire un sentiment de trouble plus profond.

C'est Sacha. Il ne va pas bien. L'alcool, les médicaments et Elle, cette fille qui l'attire et le déstabilise, n'en sont pas responsables. C'est autre chose qui le tourmente. Personne ne semble pouvoir lui faire entendre raison ou l'apaiser, pas même sa sœur... Pourtant, elle est là, partout essayant de le sortir de sa torpeur.

Mais rien n'y fait, Sacha se laisse porter par les effets du Xanax, s'abîme, au risque de sombrer.

Ce texte est court. Il est intense, dur et cru.

Mais malgré tout ce que je viens de dire, c'est beau et émouvant. Parce dans toute cette obscurité, il y a quand même un peu d'amour. Pas simple, au milieu de tout ça. Il faut bien dire que les deux principaux concernés ne se facilitent pas la tâche. Ils s'affrontent et se cherchent. Vont-ils se trouver? Sacha va t-il accepter de lâcher prise. Va t-elle accepter de mettre un pied dans l'ombre?

L'amour est parfois dangereux. Et Elle n'a pas envie de rejoindre Sacha dans le noir. Mais, Sacha même au fond de l'abîme, l'attire irrésistiblement.

Et c'est beau aussi parce qu'il y a les mots de Joanne Richoux. Comme à chaque fois, elle a les bons, ceux qui sonnent justes, qui vous prennent aux tripes, ceux qui vous entraînent littéralement, ceux qui vous perdent et qui, vous assènent la vérité.

Vous êtes là, au coeur de cette fête, de ses excès et de ses débordements, et puis, soudain, tout prend sens.


Je ne vais pas m'appesantir sur sa façon d'écrire que j'ai déjà tenté de décrire à de nombreuses reprises (Marquise, Les Collisions, Toffee Darling (tous trois parus chez Sarbacane) ou encore Désaccordée) mais vraiment, PLS est un texte très dur et très beau qui prouve (s'il y avait besoin...) et nous montre que l'autrice excelle dans ce genre de textes qui parle des sens en éveil, des ados qui sombrent, du mal-être, de l'envie de s'en sortir et de l'amour...

Je ne dévoile rien de plus de ce texte qui mérite de garder sa part de secrets.

"PLS" de Joanne Richoux

Chronique du blog Les lectures de Marinette


Ayant beaucoup aimé l'univers de l'autrice, dans les romans qu'elle a sortis chez Sarbacane (Marquise, Les Collisions & Toffee Darling), ainsi que Désaccordée chez Gulf Stream, je ne pouvais qu'attendre avec impatience un nouveau roman ! Et voilà le petit, mais fracassant PLS.

"Je suis incapable de respirer à fond. Genre, si l'inspire dure plus de trois secondes, mon thorax se verrouille. Je pourrais gonfler les poumons davantage, c'est clair, mais ça veut pas. 

Je baisse la tête. 

L'encre de mon tatouage gigote. 

Probable que j'hyperventile. Ma vision se trouble. Et puis le coeur. Ses chocs répétés entre mes côtes, jusque dans mes oreilles, qui me sortent par la bouche."

Nous suivons Sacha, le temps d'une soirée. L'occasion de découvrir le lien fort qu'il a avec sa sœur jumelle, son penchant pour Elle, la fête, les Xanax et la musique. Nous sommes entraînés par ses émotions, passons d'un endroit à l'autre, d'une personne à une autre.

Un court roman, entraînant et saisissant. Les émotions, sans cesse, à fleur de peau. Celles de Sacha, autant que les nôtres. Si j'ai eu rapidement des soupçons, sur le fond de l'histoire, ça ne m'a pas empêché d'avoir le cœur serré lorsque les choses ont été annoncées noir sur blanc. Ce que j'aime avec Joanne Richoux, c'est le mélange de sensibilité et de force qu'elle place dans ses livres. Son écriture, moderne et franche, se mêle à un je-ne-sais-quoi qui nous parle en tant qu'être humain vivant des émotions qui emportent parfois très loin. Impossible d'oublier Sacha, en fermant le livre.

vendredi 3 janvier 2020

"Météore" d'Antoine Dole

Chronique du blog Livres à profusion


Il fait beau, le soleil est revenu. Mais ce soleil revenu, qu’elle voit dans les sourires des gens qu’elle croise, est-il revenu dans son coeur ? Elle a osé porter une robe pour aller faire quelques courses.

Mais ce soleil s’assombrit car elle est agressée, insultée par trois garçons. Pourquoi encore cette agression ?

Toujours agressée verbalement et physiquement. On pourrait penser, en lisant les premières pages, à du harcèlement scolaire. Mais c’est pire que ça. L’auteur nous en dévoile les raisons vers le milieu de ce roman écrit à la première personne. Car le lecteur se pose la question. Pourquoi autant de violences ?

Quand un enfant se sait différent dès son plus jeune âge. Qu’il ne comprend pas pourquoi on essaie de le cantonner dans une case. Quand il ne comprend pas pourquoi toutes les autorités, notamment scolaires, évoquent une déviance et que ses parents doivent le remettre dans le droit chemin.

Outre tout cela, bien écrit, bien détaillé, Antoine Dole nous démontre par la force des mots ce corps que l’on hait, que l’on cache, qui ne correspond pas à ce que l’on est réellement, à ce que l’on ressent dans son coeur. Une grande souffrance pendant de très grandes années. Une grande souffrance parce que l’on ne s’aime pas et c’est cela le plus dur. Passent encore ce que peuvent nous faire subir les autres, quand on n’a pas confiance en soi, quand on n’a pas l’estime de soi, c’est ça le plus dur. Les coups des autres sont moins violents que les coups que l’on peut s’infliger à soi-même. Quand on se sent autre, quand on se croit autre, quand on se sait autre et que le corps est complètement différent, il est impossible de s’accepter. Il suffit d’une rencontre, d’une belle rencontre avec un professionnel qui comprend, qui explique que le chemin pourra être long, surtout lorsque l’on n’est pas majeur. Et ensuite, avec soi, avec sa propre volonté,avec le fait de s’accepter et surtout en étant accompagné de la famille, de la mère, le passage ne se fera pas en douceur mais ce passage permettra de vivre la vie que l’on souhaite.

Les préjugés ont la vie dure surtout lorsque l’on est adulte et qu’on les subit. Mais les préjugés sont encore pires, lorsque l’on est enfant et que l’on grandit. Comment voir le soleil alors que tout est néant autour de soi, en soi ?

Un véritable plaidoyer pour toutes les femmes, quelles qu’elles soient. Ces femmes qui font avancer le monde, ces femmes qui endurent les plus vils sévices, les femmes qui luttent pour toutes les conditions, les femmes qui ont en définitive le pouvoir, car elles donnent la vie, elles apportent l’amour. Un véritable plaidoyer pour tous ceux qui n’ont pas le corps qu’ils souhaitent, qui se sentent mal dans ce corps. Malgré cette violence, le déni face à ce corps, les violences infligées à ce corps, il n’y a jamais eu la pensée de passer à l’acte irréversible. Une très grande force de caractère, tout de même. Mais si cela avait duré au-delà de ses 16 ans, sans trouver l’aide adéquate, n’aurait-elle pas voulu en finir ?

Un livre qui démontre tout de même que l‘espoir est toujours là, qu’il faut continuerpour pouvoir croire en soi, s’accepter, s’aimer pour ce que l’on est réellement. Car comme l’écrit l’auteur par la voix de son personnage, le corps n’est qu’une enveloppe et ne démontre pas qui l’on est réellement, quelle personne on est.


"Météore" d'Antoine Dole

Chronique du blog Songes d'une Walkyrie


Météore est un ouvrage de la collection « d’une seule voix » des éditions Actes Sud Junior, une collection souvent très forte en émotions et aux sujets délicats que j’affectionne particulièrement, jusqu’à présent elle ne m’a jamais déçue. Ce nouveau titre écrit par Antoine Dole, dont j’ai découvert la plume grâce aux tires Ueno Parket Naissance des cœurs de pierre, évoque le thème de la transidentité à travers le témoignage d’une jeune adolescente transgenre qui raconte le naturel de la chose qui apparaît contre-nature, bizarre ou incompréhensible pour d’autres.

Sara a seize ans et raconte avec honnêteté, lucidité et force le calvaire d’une enfance incomprise, l’éternelle justification de ses goûts, de ses jeux soit-disant trop féminins pour un garçon, le regard des autres, entre autre adultes, des moments de complicité avec d’autres petites filles, d’une psychologie torturée, des cris silencieux à l’intérieur de ce corps qu’elle ne considère pas comme le sien, de ces dictas de la société, bornée et intolérante, de cette nature considérée comme un travers, une déficience mentale, jusqu’à ce qu’une rencontre humaine et bienveillante vienne poser les mots simples et doux sur une douleur trop longtemps enfouie.

Sara s’éveille, s’émerveille, ose, mais se confronte aussi au mur de l’intolérance violente, subit les coups, la brutalité des mots, mais toujours se relève, tel un météore indestructible, le personnage est fort, résistant, conscient de la bêtise des autres, conscient de leur incompréhension et parfaitement conscient d’être ce qu’il est et de ne pas avoir besoin de le justifier. Sara garde la tête haute, sa fierté et ne plie pas, malgré une certaine fragilité et fébrilité qui tremble face à tant de heurts.

Avec des mots simples et percutants, l’auteur retranscrit un témoignage réaliste, sensible et poignant d’une adolescente née dans un corps de garçon ; un sujet délicat et actuel. On s’immerge aisément dans la tête de Sara, on ressent pleinement ses bonheurs comme ses colères, mais aussi ses doutes comme sa volonté. On espère que ce message d’espoir malgré toutes les horreurs subies face écho au plus grand nombre. L’auteur est sensible et cela se perçoit dans ses écrits, cela apporte une certaine douceur à des émotions intenses et beaucoup de poésie à son style d’écriture.

En bref, Météore percute par sa thématique forte, explose par le témoignage de Sara réaliste et poignant et brille par son message d’espoir et cette volonté de fer, écho aux combats féminins de tout temps. Un petit ouvrage qui dévoile la naissance d’un nouvel astre, pur et simple.

mardi 1 octobre 2019

"J'ai tué un homme" de Charlotte Erlih

Chronique du blog La bibliothèque de Noukette


Elle est sûre d’elle cette voix qui s’élève. Elle ne tremble pas. Elle assume tout. Pourtant le geste n’a pas été simple. Tuer un homme, ce n’est pas rien. Mais il le fallait, ça tambourinait dans sa tête, c’était impératif. Alors elle n’a pas pu reculer. Elle, Germaine Berton, militante anarchiste, est bien la meurtrière de Léon Daudet, leader de l’Action française. Nous sommes en 1923…

Elle vacille cette voix. Elle ne sait plus à quoi se raccrocher, tout tremble autour d’elle. Mais le document est là, il va falloir signer. Prendre une décision. Son fils a besoin d’aide et elle n’a pas les clés. D’autres les auront peut-être. Après tout, ce n’est peut-être que passager. Une divagation passagère. Il travaille trop. Il a craqué…

Arthur, 14 ans, a perdu les pédales. Élève en classe de troisième à Henri IV, passionné d’histoire, il est persuadé d’être une femme, Germaine Berton, et d’avoir assassiné un homme. En plein épisode délirant, l’hospitalisation devient la seule solution. Dépassée, consciente que son fils n’est plus lui même et qu’il faut le soigner, sa mère se résout à signer la demande d’hospitalisation. Elle le connaît ce monde là. Elle y a travaillé plus de 6 ans dans ce service psychiatrique. Et elle n’en veut pas de cette pitié.

Un impressionnant roman choral qui tente de percer le mystère qui entoure le jeune Arthur. Tous tentent de dénouer les fils : les parents, les soignants, des camarades de classe et la professeure d’histoire. Et face à la maladie, tous sont démunis. Le lecteur, lui, est admiratif d’une telle maîtrise narrative. Impossible de lâcher ce roman une fois commencé. Les voix alternent et disent avec une incroyable force un sujet peu abordé en littérature jeunesse et encore tabou dans notre société : la schizophrénie. On le referme sonné par cette réalité peu connue que nous donne à voir Charlotte Erlih. Vertigineux.

"J'ai tué un homme" de Charlotte Erlih

Chronique du blog D'une berge à l'autre


Arthur vient d’être hospitalisé en psychiatrie. Souffrant d’une bouffée délirante, il se prend pour Germaine Berton, une anarchiste coupable d’un meurtre politique en 1923. Comment en est-il arrivé là ? Pourquoi Germaine Berton ? Les questions restent en suspens tandis que ses proches essaient de comprendre. Collégien en 3ème dans un lycée huppé de Paris, enfant solitaire, renfermé, sans amis, passionné par l’histoire et la lecture, Arthur a-t-il succombé à une pression scolaire trop forte, à une situation familiale trop complexe où à un mal bien plus profond ?

Un roman choral glaçant où chacun tente de percer le mystère entourant la terrible crise d’Arthur. Tandis que le discours de ce dernier montre à quel point il s’identifie à l’anarchiste, ses parents, ses professeurs, les soignants et ses camarades de classe livrent leurs interrogations, leur rapport au malade et leur difficulté à trouver une explication « concrète ». La mère est bouleversante, le père largué, la prof d’histoire culpabilise, les élèves sont d’abord odieux puis davantage compréhensifs pendant que le personnel hospitalier au bout du rouleau fait face, comme d’habitude.

Chaque voix est d’une justesse saisissante, chaque point de vue possède sa propre sensibilité. Charlotte Erlih orchestre avec maestria les prises de parole successives, insufflant à chaque témoignage une singularité évitant les redondances. Seul point véritablement commun, tout le monde semble démuni. Démuni parce qu’au cœur du maelstrom s’emparant de chacun, il y a Arthur. Insaisissable Arthur qui s’est abandonné à une autre identité, une autre vie. Comme dans Coupée en deux et High Line, on sort de ce court roman groggy, bousculé par un sujet fort, un rythme implacable et une écriture qui ne prend pas de gant pour dire l’adolescence et ses tourments, le rapport aux autres et à un avenir difficile à imaginer. Douloureusement percutant.

mardi 2 juillet 2019

"Rattrapage" de Vincent Mondiot


Chronique du blog Les lectures de Lily


Voici un petit livre qui se lit très rapidement (comme une nouvelle, en une heure maximum) mais qui a un fort impact grâce à son contenu fort et puissant.

Rattrapage, c'est l'histoire d'une jeune fille belle et populaire que tout le monde aime et adule, qui se retrouve, le jour où elle passe le rattrapage de son bac, face à un garçon qu'elle aurait préféré ne plus recroiser.
Il était dans sa classe, parfois assis non loin d'elle, elle en profitait alors pour prendre des photos compromettantes, qu'elle postait sur les réseaux sociaux cherchant à attirer les moqueries et cela fonctionnait plutôt bien en général...
Lui, ne lui a jamais rien dit, jamais rien fait, il ne s'est jamais défendu, jamais plaint jusqu'au jour où il y a eu la photo, la "blague", la moquerie de trop et ce geste qui aurait pu lui coûter la vie.

Rattrapage est un livre fort qui va à l'essentiel. J'ai aimé lire cette histoire que je n'ai pu lâcher, je l'ai lu en un souffle. Une fois refermé, il m'a fait réfléchir, car pour une fois on a le point de vue de celui qui a fait du mal, du harceleur et non de la victime. Forcément, on capte tout de suite que cette jeune fille n'a pas compris qu'elle allait beaucoup trop loin, c'est triste et pathétique et en même temps je suis convaincue que ça arrive très régulièrement. C'est un petit peu l'effet boule de neige, ça reflète tellement bien la réalité.

Le malaise qu'elle ressent lorsqu’elle se retrouve face à lui, le jour de ce rattrapage, est palpable. On comprend alors qu'elle n'est pas une mauvaise personne, elle est pleine de regrets et d'excuses qu'elle souhaiterait émettre, mais qui restent enfouis au fond d'elle.

Très honnêtement, ce roman est à mettre entre toutes les mains ! Il est très bien écrit, les émotions et sentiments des protagonistes sont parfaitement exprimés et l'ensemble donne un bon petit bouquin qui reste dans un coin de notre tête pour ne jamais en ressortir.